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dimanche 10 février 2008

Créationnisme et évolution

"Si Dieu a tout créé, il a aussi créé les pigeons. Rien que ça, ça prouve que Dieu n'existe pas: personne ne peut être aussi con. Ou alors, Dieu est très con, ce qui se tient aussi."
L'évangile selon Saint Moune

Aujourd'hui, juste avant de changer la bannière du blog parce qu'on se rapproche d'un événement honni entre tous (oui, la Saint Valentin, vous avez trouvé, vous êtes trop fort, maintenant laissez-moi parler), je vais parler science, et plus particulièrement biologie.

Avant de commencer, petit topo de vulgarisation pour expliquer ce que c'est, la théorie de l'évolution. Au commencement, il n'y avait pas grand chose. La Terre était en pleine crise d'adolescence, elle avait des éruptions de partout, lâchait des gaz délétères dans l'atmosphère, tremblait à n'en plus pouvoir, il pleuvait tout le temps, bref, c'était un peu la merde à l'époque. Par un processus mystérieux qu'on n'explique pas encore tout à fait, la vie est apparue, sous la forme d'acides aminés qui se sont rejoints pour former de l'ADN, et ainsi sont nées les premières bactéries (en gros hein). Selon certains, l'apparition de la vie provient d'un pur coup de hasard, avec de l'eau à la bonne température, contenant grâce aux vapeurs atmosphériques suffisemment d'éléments pouvant servir à créer la vie (azote, carbone...) et régulièrement frappée par de l'énergie électrique, sous forme de foudre qui venait agiter tout ce joyeux merdier. Résultat: la vie.

Maintenant, comment sommes-nous passés de la vie aquatique unicellulaire bactérienne aux magnifiques spécimens de mammifères que nous sommes à l'heure actuelle (enfin... surtout moi, vous je vous ai jamais vu nus)? Selon la grande majorité des scientifiques, par l'évolution.

Tout le monde connaît Darwin, le barbu qui a inventé la théorie de l'évolution, et dans les grandes lignes, tout le monde sait que "l'homme descend du singe", ce qui est faux mais au moins le message est à peu près passé. Maintenant, on passe au cran supérieur, je vous raconte ce qu'il en est réellement.

D'abord, tout le monde est différent, ça vous étiez au courant. A part les jumeaux (les vrais). Maintenant, pourquoi sommes-nous tous différents? Et pourquoi les jumeaux ne sont PAS différents? Parce que l'ADN. L'ADN est une substance chimique principalement constituée d'azote, qui code grâce à quatre bases azotées le génome humain, et qui est présente dans l'ensemble des cellules animales et végétales. Pour ceux qui n'ont rien pigé à la phrase précédente, je la refais. L'ADN est présent dans nos cellules, et les multiples combinaisons possibles des quatre bases azotées (le "composant de base") déterminent notre génotype, c'est-à-dire ce que nous sommes biologiquement parlant: un homme ou une femme, noir ou blanc (ou jaune ou rouge ou vert, on s'en fout), un blond ou un brun, AB+ ou O-, obèse ou cardiaque, avec des yeux bleus ou bruns, et puis aussi si on est un humain ou bien un chimpanzé, une mouche ou un manchot empereur. L'ADN, c'est ce qu'on est, en tant qu'individu et en tant qu'espèce. Sans ADN, pas de vie.

Petite précision: à l'heure actuelle, aucune étude scientifique sérieuse n'a prouvé que l'instinct criminel, la pédophilie, l'homosexualité ou la connerie tout court étaient intégrés dans l'ADN (bien que dans certains cas, l'homosexualité par exemple, cela puisse être du fait d'une insuffisance hormonale totalement aléatoire pendant un moment de la gestation).

Bref, reprenons. L'évolution passe par, en gros, deux processus fondamentaux: la mutation et la sélection.

L'ADN peut muter, notamment pendant que l'individu est à l'état de foetus, donc "en construction". C'est un événement pas si rare que ça, mais qui souvent ne se voit pas sur le visage du mutant. Cette mutation peut être délétère (dans ce cas, l'individu est mort en naissant, survit très peu de temps ou ne peut pas se reproduire), c'est un accident génétique. En admettant qu'on parle d'une mutation qui laisse le mutant vivre et se reproduire, cette mutation peut apporter un changement dans la morphologie, la physiologie ou le comportement du mutant, en bien ou en mal. Par exemple, mettons que les ancêtres des baleines avaient encore des pattes arrières développées, et qu'un jour, un baleineau est né sans ces membres. Dans ce cas précis, la mutation est positive.

La sélection est le fait que ce baleineau se soit reproduit (c'est-à-dire que sa mutation n'a pas influencé la sélection sexuelle par l'autre sexe: la nana avec qui il s'est reproduit n'avait pas grand chose à faire qu'il n'ait pas de jambes, pour être plus clair), et que ses descendants aient remplacé les anciennes baleines à jambes. Une baleine sans jambe est plus rapide et mieux adaptée à une vie aquatique qu'une baleine qui traîne des excroissances inutiles sur elle: la baleine sans jambe (et ses descendants si cette mutation se transmet) sont avantagées par rapport aux anciennes.

Les baleines sans jambe sont donc "sélectionnées": c'est la "survie du plus hardi", le mieux adapté à son environnement a de meilleures chances de survie et exclut les moins bien adaptés, qui meurent ou ne peuvent plus se reproduire face à cette compétition. Finalement, les mutations continuant, les nouvelles baleines ne peuvent plus se reproduire avec les baleines à jambes: on a deux espèces différentes. Or, si ces deux espèces cohabitent, elles utilisent le même espace et les mêmes ressources alimentaires: les mieux adaptées au milieu vont mieux se nourrir et occuper l'espace que les moins bien adaptées, qui vont donc disparaître: c'est la sélection naturelle, on sélectionne le meilleur individu et/ou la meilleure espèce au cours du temps.

Bien sur, de nombreux facteurs influent sur cette sélection, notamment le hasard: un mutant ayant reçu une super mutation de la mort qui tue mourra accidentellement avant d'avoir pu se reproduire, ou alors ses descendants mourront ou ne transmettront pas le bon allèle qui assure la mutation. Le gros manque de bol quoi.

Bon, j'espère avoir été assez clair sur la théorie de l'évolution.

Cette théorie a été moultes fois débattue dans les salons de thé londoniens, et on vit s'opposer deux grandes factions: les évolutionnistes, qui acceptaient ce que disait Darwin parce que, scientifiquement, c'était l'explication qui se tenait le mieux, et acceptaient donc l'idée que le hasard (hasard de la mutation, hasard de la sélection) était ce qui avait fabriqué les espèces actuelles; et les créationnistes, chrétiens convaincus qui pensaient que Dieu avait créé la Terre, le Ciel, les animaux, les végétaux et l'Homme avec une majuscule, et qu'il avait fait la sieste le septième jour, et que tout était exactement pareil aux commencements des temps que de nos jours, ce que contredisent maintenant les études moléculaires sur les fossiles, par exemple.

Bien entendu, en tant que scientifique je n'accorde aucun crédit aux thèses créationnistes, parce que ce n'est pas une question de croyance mais une question de science: ce que la science prouve, alors c'est ce qui est (et qu'on ne vienne pas me faire chier avec les quatre éléments ou la Terre qui était plate avant 1500: à l'époque, la science était totalement influencée par la croyance et la conviction, alors que maintenant elle démontre à l'aide de preuves). J'ai assez étudié l'évolution pour être convaincu que c'est bien comme ça que ça se passe. Après tout, l'évolution est la seule théorie qui explique tout sur le vivant et comment on en est arrivés là.

Cependant, toujours en tant que scientifique, je ne peux pas être catégorique sur la non-existence de Dieu ou d'une puissance supérieure, puisqu'il s'agit d'une histoire de croyance. Je n'y crois pas, je suis athée, agnostique, tout ce que vous voulez, mais je pense que si on en est là, c'est uniquement à cause du hasard. Or, c'est une conviction intime, une hypothèse, et pas un raisonnement scientifique. Rien n'a pour l'instant prouvé scientifiquement l'existence d'une puissance supérieure (ou plusieurs, soyons fous), mais rien n'a prouvé non plus sa non-existence. En tant que "croyant", je suis fermement attaché à la théorie de l'évolution basée sur le hasard, et combats de toutes mes forces l'enseignement du créationnisme dans certaines écoles américaines, australiennes et turques, notamment, parce qu'on n'enseigne pas une théorie religieuse en cours de sciences à des mômes malléables, c'est malhonnête. En cours de sciences, on parle sciences, avancées récentes et théories possibles.

La science a prouvé que l'évolution est une bonne théorie qui se rapproche de la réalité, mais je reconnais que la science peut se planter (même si la chance est carrément minime). La religion n'a absolument rien prouvé au niveau du créationnisme, et se met en contradiction avec toutes les dernières découvertes biologiques et géologiques du dernier siècle et demi (par exemple, les créationnistes pensent que la Terre à 6000 ans).

Maintenant, en tant que scientifique, il me faut au moins accorder du crédit à des hypothèses potentiellement recevables. Certaines personnes, en Amérique notamment, parlent de "intelligent design", le dessein intelligent, qui est une sorte de créationnisme masqué, mais surtout de "soft creationism". A savoir que l'évolution existe, mais qu'elle est orchestrée en partie ou exclusivement par des causes surnaturelles, comme Dieu. C'est une sorte de compromis. Or, il a été prouvé que bien d'autres facteurs influencent l'évolution, comme les conditions environnementales. Cependant, si on admet l'existence d'une puissance supérieure, les variations des conditions environnementales, le hasard, les mutations et tous les facteurs qui orientent l'évolution lui sont directement imputables. Pour le moment, à part une conviction profonde, rien ne me permet de rejeter scientifiquement cette hypothèse, bien que rien ne me permette de la valider non plus tant que l'existence d'une ou plusieurs puissance(s) supérieure(s) n'aura pas été prouvée scientifiquement. C'est une hypothèse, comme l'évolution: chacun est libre d'y croire ou non.

L'existence d'une puissance supérieure qui a minutieusement décidé ce qu'allait devenir la Terre est possible, parce que rien ne nous permet d'affirmer le contraire. La volonté d'avoir une conscience supérieure au-dessus de soi est peut-être typiquement humaine et ne prouve que notre faiblesse et la volonté de rejeter sa propre responsabilité ; ou prouve que les humains, seuls parmi les autres espèces, sont capables d'appréhender l'existence de cette conscience supérieure.

My point is: non au créationnisme, et oui au soft creationism et à la théorie de l'évolution enseignés à parts égales dans les classes. Il n'est pas question de science dans la foi en l'une ou l'autre des théories, mais de croyance: laissez les gosses décider ce qu'ils préfèrent, le hasard ou une puissance supérieure. M'enfin, pour cela il faudrait que les enseignants soient d'une objectivité à toute épreuve, et ne favorisent pas l'une ou l'autre des théories... Mission impossible, entre les laïcs convaincus et les religieux fanatiques, aussi cons les uns que les autres de mon point de vue.

A mon sens, toute hypothèse valable devrait recevoir un accueil critique basé sur la science et la logique, et non sur la croyance. Il faut savoir faire la part des choses: personnellement, je pense que Dieu est une grosse arnaque et que si on en est là aujourd'hui, c'est par un monstrueux coup de bol et par l'évolution naturelle. C'est ma croyance, c'est ma foi. Mais scientifiquement, je dois admettre que je me trompe peut-être et qu'il y a peut-être bien une puissance supérieure qui a tout manigancé. Pourquoi? Parce que c'est possible.

Le but de ce billet était de faire comprendre la différence entre la science et la foi, et d'essayer de prouver que les scientifiques peuvent, à tort à mon avis, rejetter des hypothèses uniquement sur la base de leur foi personnelle en l'évolution naturelle, à l'image des religieux qui rejettent des hypothèses scientifiques uniquement sur la base de leur foi en Dieu. Et, pour ceux qui ne se sentent pas particulièrement concernés par l'évolution et le créationnisme, je voulais aussi montrer que parfois, il s'agit de faire la part des choses, et qu'il faut savoir réfléchir plus loin que ses convictions.

J'espère avoir réussi...

A part ça, aujourd'hui, j'écris. Un peu.