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jeudi 25 septembre 2008

Boom baby!

"Rien ne vaut la vie à deux, si ce n'est la vie à un."
Diogène

Je savoure intensément ces mots jetés sur ce blog, comme tous les ans à la même période (à peu près) depuis trois ans: j'ai enfin le net chez moi.

Oui, je suis un nerd. J'assume.

Il s'en est passé des choses depuis la dernière fois. Je suis arrivé à La Rochelle, j'ai rencontré des gens, retrouvé la demoiselle croisée dans le train au début de l'été, commencé la fac, visité la ville, tout ça. Désormais, je fais le trajet entre ma maison et la fac en dix minutes, au lieu des quarante des premiers jours. C'est que je m'intègre. La preuve, aujourd'hui je suis allé dans le centre ville, tenez-vous bien, SANS CARTE. Quel homme, pas vrai? Eh bien je ne me suis presque pas perdu. Je commence à m'y repérer, même.

Bon, les banalités d'usage: bla bla bla vivre au bord de la mer, bla bla bla bonheur intégral, bla bla bla impression de revivre, bla bla bla vive la mer, les cités médiévales ET marines et les mouettes. Ca c'est fait.

Maintenant on va passer à un petit coup de gueule légèrement plus politique. Oh non, vous direz-vous. Eh si, rétorquerai-je. Et je vais y aller franco, en plus, quitte à me refaire harponner par la militante de droite qui écrivait en texto pour m'insulter lorsque j'en parlais l'an dernier: je vais ressortir la LRU du tiroir.

Vous vous souvenez de la LRU? La Loi de Réforme des Universités? Le joli projet monté par notre jolie ministre de l'Enseignement Supérieur, Valérie Pécresse, pour changer tout plein de choses dans les facs, les rendre libres, indépendantes, performantes, tout ça. Mais si, souvenez-vous, même que nos jolies rues étaient pleines de vils étudiants aux cheveux longs qui fumaient de la drogue et se croyaient de retour en mai 68! Oui, voilà, ces vilains petits gauchistes embrigandés par l'opposition et décérébrés par les syndicats, ceux qui ne voulaient pas de la LRU, les sots. Même qu'à l'intérieur des facs, les gens se sont battus entre ceux qui ne voulaient pas de la LRU mais qui ne voulaient pas non plus qu'on les empêche d'avoir cours, et ceux qui ne voulaient pas de la LRU et qui étaient prêts à fermer la fac pour obtenir ce qu'ils voulaient.

L'histoire s'est bien terminée: les gentils étudiants travailleurs ont obtenu après quelques semaines que les vilains glandeurs porteurs de banderoles retournent travailler au lieu de fermer les facs, la jolie ministre de l'Enseignement Supérieur a confirmé sa loi en affirmant toutefois qu'elle nous avais compris (ou alors elle a dit "je vous hais, compris?", la question se pose encore), et les facs ont dû commencer à travailler pour devenir des pôles d'excellence.

Oui mais au bout du compte, ça sert à quoi, la LRU? Techniquement, à donner de l'indépendance aux universités. En clair, à couper le cordon avec l'Etat, qui finance beaucoup moins, de manière à ce que les universités accueillent en leur sein des entreprises régionales pour financer les programmes. C'est de l'indépendance, mes amis. Ce qui se traduit par des petites modifications sans importance des budgets et de l'organisation administrative des universités.

Je vais vous donner un exemple de la magnifique utilité de la loi LRU. J'ai choisi la fac de La Rochelle parce que c'était la seule à proposer en master 2 un module de biologie sous-marine. Pour postuler dans ce module, j'ai dû passer mon niveau 2 de plongée en accéléré à la fin de l'été, claquant dans l'opération un peu plus de 600 euros, sur les 2000 que j'ai gagnés cet été. J'ai refusé des masters d'autres facs plus réputées, comme celle de Brest, ou dans la continuité directe du M1 que j'avais effectué, comme Calais/Lille. J'ai choisi de bouger encore une fois, de changer de vie une fois encore, de déménager dans un endroit où, contrairement à Lille et, dans une moindre mesure, Metz, je ne connaissais personne en arrivant. Parce que mon projet professionnel, c'est la biologie sous-marine, le métier et les compétences de plongeur scientifique. J'ai fait ce choix sans regret, j'ai payé le déménagement, l'inscription, l'installation dans l'appart avec l'argent gagné cet été, pensant pouvoir acquérir l'expérience nécessaire à mon avenir professionnel.

Mais grâce à la LRU, l'université doit, je cite nos profs, "faire des économies". Ben oui, certaines facs ont moins des âmes de requins et de publicitaires que d'autres, donc celles qui n'attirent pas toutes les entreprises de la région ont moins d'argent que les autres. A La Rochelle, pour une raison ou une autre, les modules où moins de 12 personnes s'inscrivent sont considérés comme "non rentables" et sont fermés. En biologie sous-marine, on est 9. Donc le module pour lequel plusieurs d'entre nous ont déménagé et payé ne sera pas ouvert. Merci la LRU!

Et attendez, vous n'avez pas le plus drôle. Si jamais 12 étudiants avaient postulé pour ce module, il n'aurait pas ouvert quand même: pour pouvoir le mettre en place, il ne faut pas que les étudiants soient trop nombreux, sinon ça pose problème pour la sécurité et les sorties sur le terrain. L'idéal d'effectifs serait... 8 ou 9 personnes maximum. N'est-ce point cocasse?

J'en pouffe encore.

Donc merci, chers amis étudiants, pour avoir refusé un combat contre le gouvernement quand il en était encore temps, merci d'avoir voté, un à un, l'ouverture des facs pour pouvoir passer vos précieux examens, merci d'avoir pensé à ceux qui se retrouvent et se retrouveront obligés de rentrer dans les filières "rentables" financées par les patrons d'entreprises, merci d'avoir préféré étudier studieusement et égoïstement, merci d'avoir pensé à votre année, votre avenir, vos cours, plutôt que d'avoir pensé à tout le monde, aux futurs étudiants qui prendront bientôt votre place sur les bancs des amphithéâtres et qui devront bientôt faire des choix d'options proposés par Mac Donalds, Bonduelle ou SFR (et je ne dis pas ça pour rire: des représentants de ces trois firmes siègent désormais au conseil d'administration de la faculté des sciences et techniques de Lille), à tous, vraiment, merci pour votre sens du sacrifice, votre solidarité et votre ouverture d'esprit.

L'individualisme nous tuera tous, je pense.

A part ça, j'ai les nerfs.